Devenir chauffeur de taxi à temps partiel, c’est une idée qui séduit de plus en plus de Français. Retraités actifs, salariés en quête de compléments de revenus, indépendants cherchant à rentabiliser leurs horaires creux… Mais derrière la promesse d’autonomie se cache un modèle économique beaucoup plus rigide qu’il n’y paraît. Voici ce que vous devez savoir avant d’enclencher le compteur.
Exercer à mi-temps en tant que taxi, oui, mais pas n’importe comment
Première étape obligatoire : obtenir une ADS (Autorisation de Stationnement). Sans elle, pas de maraude, pas de lumineux, pas de course.
Elle vous donne le droit de stationner sur la voie publique pour attendre des clients. Elle est attribuée par la mairie, le préfet de police à Paris ou l’intercommunalité, selon les cas. Il est possible d’exercer en temps partiel, la loi ne l’interdit pas. Ce qui est encadré, ce sont vos autres activités professionnelles.
Depuis 2016, un taxi peut aussi devenir VTC, à condition de ne pas mélanger les genres pendant une course (pas de lumineux si vous roulez pour une plateforme). Quant aux salariés, ils doivent demander l’autorisation écrite de leur employeur pour toute autre activité professionnelle.
Il vous faut également un véhicule adaptée, et pour ça la loi est claire : minimum 5 places (dont celle du chauffeur), minimum 4 portes, et minimum 6 ans pour les voitures thermiques.
Pour les fonctionnaires à temps partiel : certaines formes de cumul sont possibles, à condition de respecter les règles internes de votre administration. Idem pour les professions libérales : c’est possible, mais la gestion des charges et de la fiscalité devient vite technique.
Les charges fixes ne se mettent pas en veille
Même à mi-temps, un taxi supporte 100 % de ses charges fixes. Et elles sont loin d’être anecdotiques.
- ADS : à Paris, une licence se négocie à plus de 100 000 € (achat) ou 1 500 à 3 000 €/mois en location. En province ? De 500 à 1 500 €/mois, selon la tension du marché local.
- Assurance taxi : de 2 000 à 6 000 € par an. Et ce tarif ne bouge pas selon votre temps de conduite.
- Cotisations sociales : vous serez redevable d’un forfait minimal, même avec un chiffre d’affaires modeste.
- Véhicule taxi : qu’il roule 20 ou 50 heures par semaine, l’amortissement, la carte grise pro et la redevance taxi ne vous font pas de cadeaux.
Charges variables : un peu de marge de manœuvre
Bonne nouvelle : certaines charges dépendent du nombre de kilomètres parcourus. Ce sont celles que vous pouvez partiellement ajuster si vous limitez votre activité.
- Carburant : environ 15 à 25 % du CA. À 20 heures/semaine, comptez entre 200 et 400 €/mois.
- Entretien : plus vous roulez, plus vous payez. Estimez entre 0,10 et 0,20 €/km parcouru.
- Usure du véhicule : même à mi-temps, vous utilisez une voiture conçue pour travailler. Il faut l’amortir plus rapidement qu’une voiture de tourisme.
- TVS, carte grise, redevance d’acheminement : obligatoires dès lors que le véhicule est enregistré comme taxi.
Combien peut rapporter une activité partielle ?
Tout dépend de l’endroit, des horaires et du nombre d’heures réelles au volant. Voici quelques estimations concrètes pour 2025 :
| Volume hebdo d’activité | CA mensuel estimé (zone moyenne) | CA en zone dense (majoré 30-50 %) |
| 15 heures | 1 200 à 2 000 € | 1 600 à 3 000 € |
| 20 heures | 1 500 à 2 500 € | 2 000 à 3 750 € |
| 30 heures | 2 500 à 4 000 € | 3 250 à 6 000 € |
Mais attention : à ces montants, il faut retirer les charges fixes et variables, souvent entre 1 200 et 1 800 €/mois.
Profils types : de la rentabilité à la limite
Salarié + taxi le week-end
- Temps taxi : 15 h/semaine
- CA mensuel : 1 800 €
- Charges totales : 1 200 €
- Résultat net : 600 €
Un complément appréciable, mais à condition de tolérer deux journées de travail en plus chaque semaine.
Retraité actif bien organisé
- Temps taxi : 25 à 30 h/semaine
- CA mensuel : 2 800 €
- Charges : 1 600 €
- Résultat net : 1 200 €
Rentable si vous avez la souplesse pour cibler les créneaux rentables. Et que vous acceptez les week-ends prolongés au volant.
Le seuil à ne pas franchir : en dessous, vous travaillez à perte
Avec des charges fixes incompressibles autour de 1 500 €, votre seuil de rentabilité se situe autour de 2 000 à 2 200 € de chiffre d’affaires mensuel. Si vous ne l’atteignez pas, vous perdez de l’argent.
Et ce seuil varie en fonction du prix de votre location de licence, de vos horaires de travail, évidement de la ville où vous exercer ou encore de la demande locale.
Comment faire mieux en travaillant moins ?
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Viser les heures qui paient
- Matin (7h-9h) : trajets domicile-travail
- Soir (17h-20h) : bouchons, sorties, gares
- Nuit week-end : rentable, mais exigeant
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Travailler aux bons endroits
- Gares, hôpitaux, zones commerciales, boîtes de nuit
- Zones touristiques si vous êtes formé à l’anglais ou à la conduite commentée
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Bien choisir son régime fiscal
- Micro-entreprise : simple, mais plafonné. Vous ne déduisez rien.
- Régime réel : plus complexe, mais vous déduisez les charges. Intéressant dès que vos frais dépassent 40-50 % du CA.
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Ne pas négliger la double comptabilité
Si vous êtes salarié + taxi, attention aux URSSAF. Les cotisations indépendantes sont dues en plus de celles de votre emploi principal. Et elles ne s’annulent pas.
Un taxi à mi-temps peut être rentable. Mais seulement si vous agissez comme un pro à temps plein. Cela signifie : planification millimétrée, connaissance de votre marché local, et une gestion rigoureuse des chiffres. Sinon, vous roulerez plus pour les factures que pour votre poche.
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