ZFE, trois lettres qui redessinent la carte de France pour tous les chauffeurs professionnels, taxi en tête.
ZFE : une révolution administrative et sanitaire
Les Zones à Faibles Émissions, ou ZFE pour les intimes, ne sont pas une lubie verte venue de nulle part. Ce sont des zones urbaines dans lesquelles certains véhicules n’ont plus le droit de circuler.
L’objectif est simple : réduire les émissions de polluants atmosphériques là où les seuils légaux sont dépassés. En France, on dénombre chaque année plus de 40 000 morts prématurées liées aux particules fines. Autant dire que l’enjeu est tout sauf décoratif.
L’outil juridique derrière cette révolution ? Une directive européenne de 2008, renforcée dans l’héxagone par la loi LOM de 2019 et la loi Climat de 2021. Depuis le 1er janvier 2025, toute agglomération de plus de 150 000 habitants doit avoir sa ZFE.
Les règles du jeu : qui décide ? quoi ? où ?
C’est le maire ou le président de l’intercommunalité qui signe l’arrêté de mise en place. Il délimite la zone, fixe les horaires, les catégories de véhicules visées et les motifs de dérogation.
En 2025, 25 agglomérations disposent d’une ZFE active, dont Paris, Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Strasbourg, Lille, Rennes, etc.
Deux types de ZFE coexistent :
- Les territoires “ZFE historiques” : où la pollution dépasse régulièrement les seuils légaux (Paris, Lyon, Grenoble)
- Les territoires “de vigilance” : toutes les grandes villes concernées depuis janvier 2025 par l’obligation nationale
La vignette Crit’Air : le précieux sésame
Crit’Air, c’est le classement officiel de votre véhicule en six catégories. Plus la vignette est foncée, plus vous polluez. Et plus vous polluez, plus vous êtes restreint.
En 2025, la situation est la suivante :
- Crit’Air 0 (électrique, hydrogène) : accès libre
- Crit’Air 1 : accepté presque partout
- Crit’Air 2 : accepté sous conditions
- Crit’Air 3, 4, 5 et non classé : progressivement exclus
Paris, Lyon, Grenoble ou Montpellier interdisent déjà les Crit’Air 3 à 5 en journée. D’autres, comme Nantes ou Bordeaux, limitent uniquement les véhicules non classés.
Les dérogations : il en reste quelques unes
La loi prévoit plusieurs cas de tolérance. Certaines dérogations sont nationales :
- Véhicules d’urgence et de sécurité
- Véhicules pour personnes handicapées
- Véhicules de collection
Et d’autres sont décidées localement, selon des critères bien définis :
- “Petit rouleur” : circulation autorisée 52 jours par an
- “Commande en cours” : vous attendez votre véhicule neuf
- “Horaires décalés” : pour les travailleurs de nuit
Le chauffeur de taxi peut donc, dans certains cas, obtenir un sursis temporaire, mais il doit pour cela effectuer des démarches très précises auprès de sa collectivité.
Sanctions : pas de retrait de points , mais des amendes
En cas d’infraction, l’addition est rapide :
- 68 € pour un véhicule léger
- 135 € pour un véhicule lourd
Pas de retrait de points, mais un contrôle est un contrôle. Heureusement, en 2025, la majorité des villes reste dans une logique pédagogique. À Paris, les agents verbalisateurs ne seront pleinement actifs qu’en 2026. Strasbourg, Montpellier, Lille… Même logique : on sensibilise avant de sanctionner.
Les radars automatiques, eux, ne sont toujours pas en place. L’homologation est prévue, mais rien n’est encore déployé.
Impact concret sur les chauffeurs de taxi
L’effet de la ZFE est direct : vous ne pouvez plus rouler avec un véhicule thermique ancien dans une grande ville. Point barre.
Les taxis thermiques sont donc condamnés à moyen terme. Le basculement vers l’électrique ou l’hybride rechargeable devient inévitable.
Et ce n’est pas tout : les centrales de réservation doivent verdir leur flotte. Depuis 2024, elles doivent comporter 10 % de véhicules à faibles émissions, puis 20 % en 2027, et 35 % dès 2029.
Même si les taxis ne sont pas soumis aux mêmes quotas, la tendance réglementaire pousse dans le même sens.
Chiffres du secteur : une transition en cours
Les données 2023 parlent d’elles-mêmes :
- 56 000 chauffeurs VTC actifs
- 63 000 taxis recensés
- 52 000 candidats aux examens taxi/VTC en 2024
Les VTC se concentrent dans les métropoles. Les taxis, eux, conservent un maillage plus large, y compris en zones rurales.
Et dans ce paysage, la ZFE agit comme un filtre technologique. Seuls les véhicules propres resteront en lice.
Coût et aides : un défi pour le portefeuille
Depuis décembre 2024, le bonus écologique a été sabré. Il est supprimé pour les pros, réduit de moitié pour les particuliers. Quant à la prime à la conversion, elle a été enterrée.
Restent quelques initiatives locales. À Paris, une aide de 6 000 € est proposée pour l’achat d’un taxi électrique ou hydrogène.
Certaines plateformes tentent aussi de réagir : Uber annonce 5 millions d’euros d’enveloppe de transition pour ses chauffeurs. Mais cette aide privée est limitée.
Stratiégies pour ne pas se faire avoir par les ZFE
Pour les chauffeurs, plusieurs leviers existent :
- Investir dans un véhicule électrique, même d’occasion
- Opter pour le leasing afin d’amortir les coûts
- Demander une dérogation locale temporaire
- Se renseigner auprès de la métropole sur les aides résiduelles
Et bien sûr, ne pas oublier de commander sa vignette Crit’Air sur certificat-air.gouv.fr (3,77 €). Sans elle, vous serez verbalisé même si votre véhicule est propre.
Ce qui vous attend après 2025
La pression monte. En 2027, certaines villes comme Strasbourg envisagent d’exclure les véhicules Crit’Air 3. En 2028, ce sera au tour des Crit’Air 2 dans plusieurs communes.
Les radars automatiques arriveront peut-être. Ou pas. Difficile à dire : l’État avance doucement sur l’homologation.
Mais une chose est sûre : les ZFE ne reculeront pas. Pour continuer à exercer dans les métropoles, il faudra anticiper, s’équiper et s’adapter. Le taxi thermique vit ses dernières années dans les grandes villes.



