L’uniforme reste le même, le compteur aussi, mais le métier de taxi a changé. En 2025, les chauffeurs naviguent dans un environnement bien plus complexe qu’il y a dix ans et doit composer avec une série de défis simultanés. Ce qui autrefois relevait de la routine est aujourd’hui un exercice d’équilibriste.
Voici un état des lieux précis, sans filtre ni détours, des réalités auxquelles sont confrontés les professionnels du taxi.
Une concurrence de plus en plus féroce avec les VTC
C’est un fait. En 2025, les plateformes de VTC ont continué de grignoter du terrain, poussées par de nouvelles applis comme Comin et Maze. Ces acteurs séduisent avec des commissions réduites à 10 %, loin des standards habituels. Résultat : les taxis, coincés dans un système à tarif réglementé, doivent rivaliser avec une offre plus souple, plus rapide, parfois moins chère… et souvent mieux notée.
Le nombre de nouveaux VTC explose. En 2023, 45 000 candidats se sont inscrits aux examens, contre moins de 2 000 pour les taxis. La tendance est claire : la part de marché se rééquilibre en défaveur du taxi traditionnel, sauf pour ceux qui s’adaptent.
Une transition écologique qui coûte très cher
Il ne suffit plus d’acheter un diesel économique et de viser les 500 000 km. Les ZFE (zones à faibles émissions) imposent aux chauffeurs des véhicules classés Crit’Air 1 ou électriques. Oui, c’est bon pour la planète. Mais passer à une Toyota Prius ou une Tesla Model 3, ce n’est pas une mince affaire : comptez entre 40 000 et 65 000 € à l’achat. Et même si l’entretien est plus léger, le surcoût initial reste élevé. Sans aide publique suffisante, certains chauffeurs repoussent l’échéance… au risque de se voir refuser l’accès à leur propre zone de travail.
Transport médical : une dégradation des tarifs qui fait mal
Le transport de malades assis, souvent la principale source de revenu dans les zones rurales, a vu son tarif kilométrique passer de 1,50 € à 1 € net. Une chute brutale qui, pour certains artisans, fait s’effondrer 80 % du chiffre d’affaires. Résultat : en décembre 2024, plus de 2 000 taxis ont convergé vers l’Assemblée nationale, bloquant la circulation, organisant des opérations escargot. Les images parlent d’elles-mêmes. La profession tire la sonnette d’alarme. Mais pour l’heure, aucun correctif n’a été apporté. Mais les chauffeurs de taxi n’ont pas l’habitude de baisser la tête. Lors de la mobilisation de fin 2024, des délégations sont venues de Lille, Reims, Lyon, Marseille, Savoie ou encore Normandie. Le message est clair : la défense du métier est nationale. Cette solidarité est aussi une réponse aux menaces extérieures. Car le taxi n’est pas un simple transporteur. C’est un professionnel avec une carte, un cadre légal, une responsabilité. Et cette identité, les chauffeurs entendent bien la préserver.
L’arrivée des nouvelles technologies : adaptation ou évaporation ?
Les clients ne lèvent plus la main sur le trottoir. Ils cliquent. Et si vous n’êtes pas sur Le.Taxi, G7, Uber Taxi ou Taxiloc, vous êtes quasiment invisible. La réservation par appli est devenue la norme. Elle exige une maîtrise minimale des outils numériques : mise à jour de position, réponse rapide, notation client, compatibilité avec la facturation automatique. Il ne s’agit plus d’un gadget : c’est une compétence professionnelle. Ne pas s’y mettre revient à sortir du jeu.
Une diversification qui sauve les meubles
Maraude, transport de malades, livraison, trajets réguliers pour entreprises : le métier évolue, et ce n’est pas un mal. Les chauffeurs qui résistent le mieux sont ceux qui ne se contentent pas d’attendre à la station. Ils utilisent les outils, planifient, facturent proprement, proposent des services sur-mesure, et parfois même… créent des partenariats locaux. C’est un métier plus large, moins figé, mais aussi plus exigeant.
Un système de licence qui limite la respiration
À Paris, 17 636 taxis circulent. À peine plus qu’en 1937, alors que la ville a doublé. Pourquoi ? Parce que le nombre de licences est plafonné. Et surtout, parce que leur prix est décourageant. En dix ans, leur valeur a chuté de 25 %. Les chauffeurs qui l’ont achetée au prix fort voient leur patrimoine professionnel s’évaporer. Et ceux qui veulent entrer dans le métier hésitent : investir plus de 100 000 € pour un titre qui perd de la valeur chaque année ? Difficile à justifier.
Une réglementation environnementale à marche forcée
Crit’Air, restrictions horaires, obligation de renouveler son véhicule, voire interdiction de circuler dans certaines zones : les règles changent, parfois sans préavis. Et l’État ne compense pas toujours. La réglementation évolue plus vite que les aides à l’achat ou les infrastructures de recharge. Même les professionnels qui veulent s’équiper se heurtent à des délais de livraison de plusieurs mois ou à un réseau de bornes insuffisant. Les plus pessimistes parlent d’un « étouffement progressif ». Les plus lucides parlent d’une transition mal accompagnée.
Les VTC ne sont pas mieux traités… Mais avancent plus vite
Côté VTC, la grogne monte aussi. En 2025, les plateformes ont dû revoir leur copie : minimum de 9 € par course, 30 € l’heure garantie dans certaines conditions. Cela reste en dessous de ce que facture un taxi, mais le volume compense. Le problème ? Ces ajustements renforcent leur attractivité, et les clients ne voient que le confort et le prix. Pour eux, un VTC ou un taxi, c’est souvent la même chose. Sauf que les règles, les obligations et les formations n’ont rien à voir.
Le métier change, mais il ne disparaît pas
Le taxi de 2025 n’est plus celui de 1995. Ni celui de 2010. Mais rassurez-vous, il existe encore, et il existera demain. À condition de maîtriser son outil de travail, d’intégrer les applications, de gérer son administratif, de suivre les évolutions techniques, et surtout… de comprendre les attentes des clients.
Ce n’est pas un effondrement, c’est une transformation mais attention : elle ne se fera pas toute seule.
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